Orthoptie pour les pros
La rédaction d’une conférence de consensus était une lourde tâche pour les bénévoles de la SFERO. Suite à une vaste consultation de la communauté orthoptique, nous avons réalisé un état des lieux de notre pratique . Nous vous invitons à acquérir ce document dans lequel vous trouverez l’organisation et le déroulement de ce travail , les résultats et les recommandations . Nous souhaitons que vous trouverez des apports théoriques enrichissants pour votre pratique quotidienne.
Le livret ( 110 pages ) est vendu au prix de 15 euros.
Consulter les premières pages (pdf).
Vous pouvez télécharger ici le bon de commande et l’adresser avec votre règlement à :
Fabienne PETER -KAWKA
Orthoptiste
Trésorière de la SFERO
1B , rue des Vosges
68110 ILLZACH
Quelle est la place de l’orthoptiste dans le dépistage des troubles visuels de l’enfant de 0 à 3 ans ?
Lors de son examen, l’orthoptiste recherchera une éventuelle amblyopie, insuffisance uni ou bi latérale de la discrimination des formes entrainant chez l’enfant un trouble de la maturation du cortex irréversible en l’absence de traitement. Il peut s’agir d’amblyopie organique, d’amblyopie de privation, d’amblyopie fonctionnelle ou mixte.
Les facteurs amblyogènes sont représentés par l’ensemble des troubles visuels susceptibles d’entrainer une amblyopie : les troubles de la réfraction (myopie, astigmatisme, hypermétropie) qui peuvent toucher les deux yeux de manière identique ou non (anisométropie), le strabisme, les atteintes organiques de l’œil (rétinopathie, rétinoblastome, cataracte, opacités cornéennes, nystagmus, glaucome congénital), les obstacles sur le trajet lumineux (ptosis, hémangiome, occlusion de l’œil).
Si l’amblyopie est décelée et traitée avant l’âge de trois ans, les chances de récupération de l’acuité visuelle sont maximales.
L’orthoptiste notera également la présence d’un strabisme et/ou décèlera un comportement visuel anormal.
L’orthoptiste est sollicité bien souvent en première intention par le pédiatre, le généraliste.
Quels sont les facteurs de risques nécessitant une attention particulière ?
Antécédents familiaux (amétropie, strabisme, amblyopie, pathologies visuelles…) Petit poids de naissance (inférieur à 1500 grammes), prématurité (âge gestationnel inférieur à 32 semaines) et/ ou association avec une rétinopathie du prématuré et/ou une complication cérébrale de la prématurité, IMC, troubles neuro-moteurs, anomalies chromosomiques en particulier la trisomie 21, craniosténoses et les malformations de la face, embryofoetopathies, exposition in utero à des substances toxiques (médicaments, drogues, alcool, tabac, saturnisme…), exposition à des virus (CMV, toxoplasmose…rubéole), carences alimentaires
Quels sont les signes d’appels ?
Avant 6 mois :
Le strabisme (constant avant 6 mois et intermittent après 6 mois)
Le nystagmus
Le torticolis
Une anomalie objective au niveau des paupières, des globes oculaires, des conjonctives, de la cornée, de l’iris, des pupilles, les leucocories…
Une anomalie du comportement visuel : manque d’intérêt aux stimuli visuels, absence du clignement à la lumière dès les premiers jours, absence du réflexe de fixation après 1 mois, absence du réflexe de clignement à la menace après 3 mois, du réflexe de poursuite oculaire après 4 mois, retard d’acquisition de la préhension des objets (normalement présente entre 4 et 5 mois), pauvreté de la mimique, absence de sourire, plafonnement ou errance du regard, signe oculo-digital ….
De 6 mois à l’acquisition de la parole :
En plus des signes précédents, il faut être attentif à un enfant qui se cogne, tombe fréquemment, butte sur les trottoirs ou les marches d’escaliers, plisse les yeux ou fait des grimaces, cligne ou ferme un œil au soleil, semble photophobe.
Après l’acquisition de la parole (l’enfant d’âge verbal)
En plus des signes précédents, il faut être attentif aux signes fonctionnels suivant : picotements et brûlures oculaires, gène visuelle en vision de loin ou en vision de près, diplopie, céphalées (en fin de journée ou après fixation prolongée)
Bibliographie :
- Guide pratique de la Société Française de Pédiatrie, dépistage des troubles visuels de l’enfant (juin 2009)
- HAS / Service des recommandations professionnelles de septembre 2005 « Proposition d’un groupe de travail portant sur le dépistage individuel chez l’enfant de 28 jours à 6 mois »
- HAS /Recommandations sur le dépistage précoce des troubles de la fonction visuelle chez l’enfant pour prévenir l’amblyopie octobre 2002 ANAES
L’analyse des troubles neurovisuels est uniquement inscrite aux compétences des orthoptistes dans le Décret N°2016-1670 du 5 décembre 2016. Il existe donc une cotation dédiée à l’évaluation et à la prise en soins de ces troubles remboursés par la sécurité sociale, et ce pour les adultes et les enfants.
Le cœur de métier de l’orthoptiste est la fonction visuelle, une fonction practo-gnosique.
Le cerveau, ordinateur central indispensable peut s’exprimer grâce à la fonction oculomotrice qui permet d’analyser en mouvement l’environnement.
Sans mouvement, pas de vision.
L’orthoptie a depuis ses origines pris en charge les problématiques de la fonction visuelle dans toutes ses composantes : du tandem binoculaire aux praxies visuelles, de l’amblyopie organique à l’amblyopie fonctionnelle en passant par la mise en place du patrimoine visuel.
Quelle définition donnée aux troubles neuro visuels :
Les troubles neurovisuels sont appelés partout dans le monde CVI : Congenital Visual Impairment. Ils ont été définis en 2013 par l’American Conference on Pediatric Cortical Visual Impairment (PVCI). Le terme CVI est utilisé pour spécifier une déficience visuelle cérébrale et est appelé en France « troubles neurovisuels ». Ces dommages au cerveau affectent la façon dont le patient traite l’environnement visuel.
Cette définition est inclusive et comprend :
- une étape sensorielle: l’état réfractif, les problèmes optiques et le dysfonctionnement de l’oculomotricité.
- une étape perceptive: les pathologies des neuro-voies.
- une étape cognitive: les pathologies corticales et donc le traitement de l’information visuelle en mouvement (mécanismes de traitement du flux dorsal et ventral).
Les troubles neurovisuels s’étendent de la cécité corticale aux séquelles d’une atteinte de l’ordinateur central sur la voie ventrale ou dorsale en passant par l’atteinte des voies de transmission et bien sur par un trouble des praxies visuelles.
L’étiologie est diverse et on peut citer :
- Hypoxie +++ :anté ou périnatale,
- AVC
- Méningites, méningo-encéphalites
- Infections congénitales
- Malformations cérébrales
- Conséquences d’interventions neurochirurgicales
- Troubles neurodéveloppementaux
La prévalence est encore mal étudiée mais on retrouve des lésions cérébrales précoces, selon l’étude d’Atkinson et Braddick avec des leucomalacies périventriculaires du grand prématuré, lésions occipitales néonatales anoxiques ou séquellaires d’hypoglycémie, syndrome de Silverman : 60 à 70 % de ces enfants présentent des troubles neuro-ophtalmologiques associant, à des degrés divers, des troubles oculomoteurs, une altération de l’acuité visuelle, des troubles visuoperceptifs, constructifs, gnosiques, ou de la coordination oculomanuelle.
(Atkinson J. Braddick O. Visual and visuocognitive development in children born very prematurely. Prog Brain Res 2007 ; 164 : 123-49).
La prise en charge orthoptique neuro visuelle :
Le bilan démarre par une anamnèse, un questionnaire puis une évaluation sensori-motrice et perceptivo cognitive complètera cet état des lieux.
L’utilisation de tests normés est devenu systématique en orthoptie et elle est très souvent complétée par des mesures normées à l’oculométrie ( eye tracking) .
Après un diagnostic orthoptique un protocole définira les objectifs de la prise en charge orthoptique neuro visuelle.
La prise en charge sera analytique et écologique.
Tout médecin qui suspecte un trouble « neurovisuel » doit demander un bilan orthoptique neuro visuel approfondi, afin de poser le diagnostic et faire reconnaître le handicap et comprendre les plaintes du patient. L’intérêt principal du bilan neurovisuel reste la reconnaissance du trouble, le traitement orthoptique ciblé et la justification des aménagements scolaires.